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France – Collonges-au-Mont-d’Or – Restaurant Paul Bocuse – 3* Michelin (en 2017) – 18/20 au Gault & Millau

La théorie de la relativité restreinte d’Einstein a établi qu’il est théoriquement possible de voyager dans le temps. Supposons un astronaute se déplaçant dans l’espace à la vitesse de la lumière. Pour lui le temps ne s’écoulerait que de quelques heures alors que, sur terre, cela correspondrait à plusieurs années. Le temps n’est pas une constante (c’est la vitesse de la lumière qui l’est) et donc le temps passe plus lentement sur terre quand dans ce vaisseau spatial.Une des conséquence de la théorie d’Einstein est que le voyage dans le temps est uniquement possible vers le futur et qu’il est irréversible.

Mais Einstein ne connaissait visiblement pas le restaurant Paul Bocuse à Collonges-au-Mont-d’Or. Car manger chez Monsieur Paul, c’est faire, l’espace d’un repas, un bond de 50 ans en arrière.

Direction Collonges-au-Mont-d’Or pour l’embarquement

J’avais acheté mon billet pour voyager dans le temps sur leur site internet, bien à l’avance. Le jour venu, direction l’embarquement. Le vaisseau spatial se repère de loin : il resplendit de mille feux et de couleurs chatoyantes. On pourrait même oser le mot « kitsch« .

Un groom fait le pied de grue à l’entrée, guettant les voyageurs….Si le mauvais temps est de la partie, son parapluie rouge lui sera bien utile. 

Le voyage peut commencer

A peine le seuil de porte franchi, le saut de cinquante ans dans le passé est instantané. Et je vous rassure : il se fait sans la moindre douleur. Il faut dire que les sourires sont de mise et l’accueil chaleureux. 

Dans le vaisseau spatial de Paul Bocuse, il y a plusieurs cabines. C’est un vrai dédale qui s’enchaîne et qui permet d’accueillir énormément de voyageurs temporels. Nous avons donc été conduit jusqu’à notre cabine, à partager avec d’autres. Le décor est à la gloire de la cuisine, de Collonges-au-Mont-d’Or et de Paul Bocuse bien sûr.

Le capitaine….ou plutôt les capitaines

Aux manettes journalières du vaisseau, ce n’est plus Paul Bocuse le capitaine. Trois officiers MOF (Meilleurs ouvriers de France, facilement reconnaissables à leur col tricolore) formés par Paul Bocuse ont pris la relève. Deux d’entre eux étaient d’ailleurs en train de discuter du plan de route, en plein milieu de la salle des machines. 

Mais le capitaine, Paul Bocuse, avait pris soin de laisser un petit mot à ses voyageurs.

On attache ses ceintures…

Installés confortablement dans nos sièges, le voyage dans le passé pouvait se poursuivre de plus belle. C’est à ce moment qu’il faut boucler ses ceintures car la cuisine trois étoiles de Paul Bocuse, cela décoiffe.

Dans le vaisseau, on a le choix. Soit on peut partir vers un choix à la carte d’une belle liste des excursions temporelles, ce que nous avons choisi de faire. 

Soit on peut choisir un voyage sur mesure concocté par Paul Bocuse dont le plus beau et le plus cher est intitulé le menu Grande Tradition Classique.

Il faut savoir que voyager dans le temps ouvre l’appétit. Alors Paul Bocuse voit grand, très grand, immensément grand. Notre steward  l’avouait : en 12 ans il n’a jamais vu personne revenir de son voyage en ayant faim. Alors je vous le conseille : piochez donc à la carte trois services, évitez le pain et surtout gardez une belle place pour le dessert.

C’est parti !

La première excursion a été prévue en 1975, du temps où Valéry Giscard d’Estaing était président de la république. Ce plat fût créé pour le Palais de l’Elysée, à l’occasion de la remise du titre de Chevalier de la Légion d’Honneur. Paul Bocuse avait alors concocté cette soupe afin de, selon son expression, casser la croûte avec le président.

Quel plaisir que de revivre ce moment et d’imaginer la surprise qu’a eue le président quand il a brisé la pâte feuilleté et que les arômes de la cuisson à l’étouffée ont révélé toute la complexité de leurs arômes. On comprend de suite pourquoi ce plat est le plat le plus mythique de la cuisine. 

Mais il faudra que je reprogramme un autre voyage et que j’affine un peu la date de destination. En janvier, des vraies truffes noires d’hiver relèveront encore mieux le plat que les truffes sous-vides du mois de juin. Il n’empêche : même avec plus de retenue dans leurs arômes, ce plat est grandissime et sublimé par la truffe.

Les excursions suivantes ont à nouveau permis d’explorer toute la richesse et la gourmandise de Paul Bocuse. Des grands classiques, des beaux classiques et surtout des classiques où priment le goût et la sincérité. On comprend pourquoi Paul Bocuse a écrit une si belle page de la gastronomie française et pourquoi il a inspiré tant de grands chefs.

Filet de boeuf Rossini, sauce Périgueux

Le service de l’équipage chez Paul Bocuse

Dans ce voyage, une chose est frappante : le service ! Il y a 50 ans, on savait mettre à l’honneur les métiers de la table. Il faut dire que là aussi un MOF (Meilleur Ouvrier de France) est à la manoeuvre.

De nombreux plats sont dressés devant les voyageurs. 

Les découpes, comme pour la volaille en vessie « Mère Fillioux », montre toute la dextérité du couteau. Le geste est net et précis, quasiment du niveau d’un chirurgien.

C’est durant ces moments que la nostalgie vous saisit et qu’on en regrette amèrement cette tradition qui se perd.

On finit en apothéose

Et puis vient ce moment magique, celui qui va clôturer l’expérience en apothéose. Toute une série de magnifiques desserts alignés sur de grands plateaux d’argent : Baba au rhum « Tradition », Oeufs à la neige Grand-Mère Bocuse, Salade de fruits frais, Fruits rouges, Tarte sablée framboise et citron, Crème brulée à la cassonade Sirio, Gâteau Président Maurice Bernachon. On ne sait quoi choisir…..c’en est même très très ennuyant. Mais Paul Bocuse à pensé à tout : on peut en manger autant qu’on veut….enfin s’il reste encore de la place dans l’estomac, ce qui est loin d’être gagné tant les assiettes sont généreuses.

L’esprit Paul Bocuse

Ce qui rend cette expérience unique en son genre, c’est aussi l’esprit qui règne dans la maison. Paul Bocuse, à la façon d’Harry Potter, a réussi a créer un horcruxes. Il a réussi à détacher une partie de son âme et il a réussi à l’insérer dans son vaisseau à voyager dans le temps.

La jovialité est de mise. Ce n’est pas parce qu’on a trois étoiles au Michelin depuis 50 ans qu’il faut se montrer ennuyeux. L’ambiance est bonne enfant. On se parle, on rit, on échange des sourires de contentement et on se promène même pour prendre des photos.

La bonne humeur est même à son comble quand un des stewards sort son orgue de barbarie pour faire résonner dans la salle un « Happy Birthday » à un des voyageurs. La salle entière s’amuse, rit et applaudit.

Ce qu’on boit chez Paul Bocuse

Un voyage dans le temps, cela donne soif aussi. Pas de problèmes, le vaisseau a ses soutes bien remplies : 500 références et 20 000 bouteilles.

Et tout au bout de la cave, la reserve personnelle du capitaine.

Le voyage dans le temps est aussi possible pour les boissons. Mais là, l’excursion est réservée aux V.I.P détenteurs de Stratus Rewards Visa; ou de la black Card d’American Express. Parce qu’acheter une Romanée-Conti 1966 (quand il y en a), cela coûte tout de même 6 800€

Les voyageurs moins aisés pourront toutefois trouver de belles pioches, bien plus jeunes évidemment, comme ce Chinon Clos de la Dioterie 2009 de chez Joguet (25 euros au domaine et 90 euros à la carte soit un X3,5 de moyenne ce qui est raisonnable vu le niveau)

Ou les voyageurs pourront opter pour une sélection au verre dont ce magnifique Krug à 30 euros la coupe (d’autres champagnes moins chers sont proposés à 18 €).

L’atterissage

Toutes les bonnes choses ont une fin et c’est avec un ventre bien rempli, les yeux pleins d’étoiles et le coeur remplit de nostalgie que le voyage se termina finalement. Mais Paul Bocuse sait comment faire perdurer les beaux souvenirs. Un petit cadeau nous attendait à la sortie: le plan de vol de notre voyage.

Allez manger dans le restaurant Paul Bocuse s’apparente à un voyage dans le temps…voyage qui confirme que le bon goût et le goût du bon est intemporel ! D’ailleurs l’esprit de Monsieur Paul n’est pas prêt de disparaitre de Collonges : il est aussi durablement insufflé que n’est ancrée sa statue dans la cour d’honneur.

Pour ceux qui souhaitent en savoir plus, voici quelques livres autour de Paul Bocuse


LOCALISATION

France – Collonges-au-Mont-d’Or


PHOTOS


SITE WEB DU RESTAURANT

https://bocuse.fr/fr/

 

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