Le restaurant
Tous les gastronomes connaissent L’Eau-Vive et Pierre Résimont. Parmi les nombreuses adresses de ce chef, on retrouve le comptoir de L’eau-vive situé à Erpent. La cheffe, Manon Destreille, y prépare une cuisine plus simple que celle de Pierre Résimont. Mais qui dit simple ne dit pas inintéressante et c’est même tout le contraire quand elle est exécutée à ce niveau.
La carte des vins au Comptoir de L’eau-vive.
La carte des vins, tout comme le menu d’ailleurs, est présentée sur une tablette.
C’est une carte de vins avec une sélection assez pointue et des vignerons de qualité. Les prix sont en dessous de la moyenne pratiquée par l’Horeca puisque le coefficient multiplicateur se situe entre le X2 et X3 (plus proche du X2 que du X3).
Par exemple, la cuvée Marnes Rouges 2021 est affichée à 45 euros à la carte du comptoir de l’eau-vive quand son prix de vente particulier est autour des 20 euros. Enfin un restaurant qui a compris que les vins ne sont pas « la vache à lait » qu’il faut traire à son maximum pour réaliser quasiment tout le bénéfice du restaurant !
Cette cuvée, à base de Trousseau à la Dame » (60%), de Poulsard (10%), et de Pinot Noir (10%), est une petite pépite que je recommande fortement. Ces arômes de mûres et de poivre ainsi qu’une touche de fumé se marient à merveille avec les ris de veau.
Au comptoir de l’eau-vive, on apprécie que l’on prenne soin de la température de service. Ce vin du Jura nécessite d’être servi deux ou trois degrés en moins que la plupart des autres vins rouges. Le vin est arrivé à table à la bonne température. Un seau à glace a été apporté, non pas pour y plonger la bouteille mais pour y accoler la carafe afin que le froid s’y diffuse lentement. Cela a parfaitement fonctionné et on a eu le bonheur d’apprécier son vin à bonne température pendant toute la durée de vie de la bouteille (ce qui, il est vrai, est très relatif puisqu’une soif n’est pas l’autre).
Anouck Fransolet, sommelière au comptoir de l’eau-vive.
La gérante et sommelière, au comptoir de l’eau-vive, c’est Anouck Fransolet. Je me souviens d’Anouck du temps où elle officiait à l’Eau-Vive (2* Michelin). Elle est ensuite partie entamer une formation d’oenologue à Bordeaux et puis est revenue et s’est installée au comptoir de l’eau-vive
Les accords mets-vin d’Anouck sont pointus et engagés. On peut ne pas aimer certains vins mais on ne peut que reconnaître le bon fonctionnement de l’accord. Par exemple, Anouck propose un Jurançon sucré de l’excellent Domaine de Souch pour accompagner les gyozas sauce hoisin. Le sucre n’est plus très à la mode chez les amateurs de vin et je n’y déroge pas. Mais, quand la sucrosité du vin est associée à une belle acidité et lorsque le plat contient des notes sucrées (ici via la sauce hoisin), on comprend que l’intention d’Anouck est rencontrée : le vin apporte une profondeur au plat et l’accord est pertinent.
L’accord qui m’a particulièrement impressionné, c’est celui du vin orange Holass Folklór avec le tartare de veau. Un vin orange est un vin à base de raisins blancs mais vinifié comme un vin rouge avec, donc, une macération longue avec les peaux. C’est cette macération de plusieurs jours qui lui donne sa couleur orange. C’est un type de vin assez extrême et que je trouve difficile à boire seul. Bien que ce fût, à un moment, fort à la mode dans les milieux branchés, je n’en ai jamais eu une seule bouteille en cave. Mais, et c’est là toute la force d’une excellente sommelière, un verre de Holass Folklór servi avec le tartare de veau est un accord transcendant tellement le mariage du vin et de la tomate fait merveille. Je pense donc, maintenant, acheter quelques bouteilles.
Au final, avec Anouck aux commandes, on est devant un dilemme. Piocher une pépite à prix décent dans la carte ou être surpris , parfois même être interpellé, par les accords pointus ? Je pense que je pencherais plutôt pour la seconde solution.
Cette semaine, j’étais allé à l’ouverture chez Taste & Go. Par hasard, un ami s’y trouvait aussi. Cet ami, médecin, est la personne la plus pointue que je connaisse sur les grands vins de Bourgogne, aussi bien en termes de connaissances qu’en termes d’expériences. Il me disait, en parlant d’Anouck : « J’aime beaucoup ses analyses. Elles sont toujours très précises et très justes ». Venant de lui, qui organise chez lui des dégustations à l’aveugle incroyables (les plus belles de ma vie), c’est un sacré compliment.
La cuisine au comptoir de l’eau-vive
La cuisine du comptoir de l’eau-vive, exécutée par Manon Destreille est techniquement totalement irréprochable. C’est très impressionnant de goûter, avec un plaisir exacerbé, à quel point les cuissons, les associations, la température de service et les assaisonnements sont parfaits. Sur les quatre plats dégustés, il n’y a pas la moindre chose à critiquer. C’est d’un niveau technique qu’on ne rencontre pas souvent parce que, en général, il faut aller le chercher dans les deux étoiles Michelin et plus.
Les associations des produits sont bien pensées et sages : on ne part pas sur des délires en associant, au petit bonheur, la chance tout ce qui tombe sous la main. Cela donne donc une cuisine fraîche et efficace qui fait plaisir aux papilles gustatives. On reste aussi sur la simplicité et la mise en valeur de beaux produits. Exit donc, au comptoir de l’eau-vive, toutes ces jeux de textures tellement fatiguant.
Pour ce repas, j’avais choisi de manger à la carte. En première entrée, le tartare de veau, tomates à l’huile de basilic, mayonnaise anchois, câpres frits. Le tartare veau a une mâche parfaite avec un beau fondant mais tout en gardant une pointe de fermeté. Juste ce qu’il faut. La composition de l’assiette est parfaite, avec beaucoup de fraîcheur et une belle rondeur apportée par la mayonnaise aux anchois.
Je n’étais pas convaincu, à priori, par le toast de girolles, ail, crème, ciboulette, jambon Bellota. Gourmand et difficile, je reste en général sur mes trois champignons favoris : cèpes, morilles ou truffes. Les girolles manquent souvent de finesse et sont très vite mollassonnes après cuisson. Sauf que, ici, les girolles sont toutes petites. Un beau produit de qualité, comme ici, cela change tout. Et, quand on y apporte de la gourmandise avec du Bellota et un peu de crème, on sort un plat simple mais tellement bon !
En plat principal, je ne voulais pas faire l’impasse sur le plus beau burger de Wallonie : le burger de ris de veau et homard, béarnaise, frites. Sur ce plat, tout est fait maison que l’on parle des frites ou du pain. C’est un plat qui a son prix (50 euros) mais, avec ce niveau d’exécution et ces produits nobles, on se régale. C’est en fait la version junk food d’un des plus grands plats que j’aie mangé de ma vie : le homard ris de veau béarnaise au jus des carcasses de feu le Sea Grill.
L’ambiance et le service
On en parle peu en général : le service en salle. Celui du comptoir de l’eau-vive est assez efficace. C’est vrai qu’il doit courir un peu partout (et, vu les prix, c’est cohérent) mais il reste assez efficace et précis.
Les explications sont claires et le personnel de salle est souriant et agréable. On ne manque jamais de rien (pain, beurre) et les vins sont toujours servis et prêts donc quand l’assiette arrive.
L’ambiance générale est assez cool. Cela se voit dans l’épanouissement de l’équipe. C’est donc, aussi, un endroit où on peut venir manger avec des enfants (sages bien entendus). Car, eux aussi, trouveront leur bonheur avec des frites fraîches, une mayonnaise maison et un bon burger (ou des boulettes sauce tomate).
Conclusion
Le comptoir de l’eau-vive est un magnifique rapport qualité-prix : une cuisine simple et de qualité préparée avec brio par Manon Destreille et des accords mets-vins de haute précision par la gérante et sommelière Anouck Fransolet. C’est une adresse sans chichis mais sans concessions non plus et la qualité, en particulier des produits, est au rendez-vous à chaque envoi.
Un ami me disait récemment qu’il s’emmerdait dans les restaurants gastronomiques et qu’il préférait une brasserie avec une belle carte de vin. Hélas pour lui, c’est une denrée rare. Je vais me faire un plaisir de lui recommander le comptoir de l’eau-vive.
Site web du restaurant
https://www.eau-vive.be/chambres-hotes-restaurant-bistro-namur
Localisation du restaurant
Menu
Mise en bouche
Gyoza de cuisse de canard, Poireaux brulés, sauce hoisin et sésame
Tartare de Veau , Tomates de notre producteur à l’huile de basilic, mayonnaise anchois, câpres frits et tuile de parmesan
Toast de girolles, ail, crème, ciboulette, jambon Bellota
Ris de veau croustillant, purée Résimont, aubergines, girolles, béarnaise
Béarnaise
Burger de ris de veau et homard, béarnaise, frites
LOCALISATION
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D’autres repas
04/08/2018 : https://www.passiongastronomie.be/2018/08/restaurant-lecomptoir-de-eau-vive/
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