France – Honfleur – Restaurant SaQuaNa par Alexandre Bourdas – 2 * Michelin – 15,5/20 au Gault & Millau

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Restaurant SaQuaNa par Alexandre Bourdas à Honfleur – France : 2 étoiles Michelin – 3 Toques Gault & Millau


En vacances, ma passion gastronomique ne disparaît pas, que du contraire. A peine arrivé (quand ce n’est pas tout simplement au moment de choisir la destination), je recherche LA belle table de la région. SaQuaNa, avec ses deux étoiles Michelin et ses trois toques au Gault & Millau (on se demande d’ailleurs pourquoi pas quatre), s’est donc naturellement imposé. Il s’est d’autant plus imposé que le chef belge Yves Mattagne (du Sea Grill – 2* Michelin – 18/20 au Gault & Millau) m’en avait parlé en des termes très élogieux.

SaQuaNa…..pardon je n’ai pas compris ce que vous dites ? SAveur – QUAlité – NAture ou encore Sakana, le mot japonais signifiant poisson. Mais avant tout SaQuaNa est le restaurant d’Alexandre Bourdas, un restaurant d’exception n’en déplaise à ce qu’en dit Google quand on fait une recherche.

C’est vrai qu’il est situé en plein centre d’Honfleur et que les touristes, à la recherche d’un endroit où manger, s’arrêtent et regardent le menu. Les prix, remarquablement bas pour un restaurant de ce niveau (80 euros le petit menu et 120 euros le grand menu), en attirent même quelques-uns à l’intérieur. S’ils ont de la chance, il restera de la place et ils y feront sans doute le repas de leur vie. Dans le cas le plus probable, le restaurant sera complet et ils ressortiront sans même s’être rendu compte de ce à côté de quoi ils seront passés (ce qui est mieux pour eux).

Quand j’y pense, je comprends pourquoi Yves Mattagne du Sea Grill adore cette adresse : il y a une véritable ressemblance avec sa cuisine : la proéminence du poisson, la précision des cuissons et la finesse d’associations subtiles et légères basées sur une inspiration asiatique. C’est un style culinaire dont je raffole.

On dit parfois que la cuisine de SaQuaNa est minimaliste. Je n’adhère pas vraiment à cette définition. Je trouve au contraire la cuisine travaillée et technique. Mais une technicité au service du goût et qui se fait oublier. La technique sert le produit et l’assiette et la technique n’est ni une fin en soi ni un outil pour masquer une manque de personnalité.

Dans les assiettes se dégagent une âme et une signature. Alexandre Bourdas sait exactement ce qu’il veut faire et construit son menu pour amener ses clients là où il le souhaite : dans la découverte et dans le plaisir. Différentes techniques de cuisson se succèdent : poché, snacké, étuvé, grillé, rôti et les plats sont envoyés dans un ordre crescendo de gourmandise et de puissance.

Après quelques mises en bouche qui m’ont déçues (ce fût ma seule déception mais je les ai trouvées sous assaisonnées et manquant de relief), le premier plat m’a complètement scotché. Un coup de coeur absolu autour d’une merveilleuse lotte pochée et des arômes de citron vert, lièche, noix de coco et Combava. Rien à voir avec un curry de poisson  mais une lotte cuite à la perfection (trop cuite, c’est du caoutchouc et pas assez cuit, c’est indécoupable) rehaussé par des saveurs asiatiques subtiles (sans doute une eau de coco) et merveilleusement harmonieuses. C’est à la fois frais et léger et à la fois plein de saveurs. Quelle merveille ! Si je reviens, j’espère que le plat sera passé dans les plats signatures et que je pourrai le redéguster.

Sur leur site web, la philosophie du restaurant est résumé : « La table est un lieu de plaisir, un lieu de rencontre. Un lieu où l’on rit, partage, ripaille, un lieu que je veux populaire. ». Il va sans dire qu’on ne ripaille pas dans un deux étoiles Michelin mais l’idée de simplicité, de rire et de bonne humeur se ressent. Il se perçoit tout d’abord au travers du cadre moderne et épuré et il se ressent dans un service décontracté, souriant et agréable.

La maîtresse de maison, Delphine, se révèle être une hôte de toute première qualité. Le contact est très vite passé à tel point que j’ai osé demandé une dédicace du chef. Non seulement le menu est revenu signé mais Delphine nous a proposé une rencontre avec le chef, une très gentille proposition pour un épicurien. Mais, sachant que le service fût long et soucieux de laisser le chef un peu profiter d’une partie de son dimanche, j’ai décliné l’invitation. Je n’en reste pas moins reconnaissant de l’avoir proposé.

« Nous avons banni tout ce qui ressemble au marketing, nous ne voulons que la dimension humaine et la joie de partager un bon repas avec des inconnus ou des amis dans ce lieu qui est nôtre. ». De fait, il se dégage une atmosphère qui tend vers la convivialité et le partage.

A l’autre bout du restaurant, j’avais constaté une table de joyeux convives et d’amateurs de vins (on les repère : ce sont souvent ceux qui commandent à la carte au lieu de prendre les forfaits vins). Passant à côté de la table, je leur glisse un mot au sujet de la belle bouteille qu’ils avaient commandée. En fin connaisseur, on me répond « votre Clos Rougeard n’est pas mal non plus ». On échange quelques mots de plus, quelques verres, on sourit, on rit et puis on se quitte. Sans le savoir, j’avais rencontré Eric Bordelet, « Sydriculteur, Pomologue et Poirologue en Normandie (www.ericbordelet.com/) »

Il n’est pas étonnant que Eric Bordelet soit un fidèle du lieu : il y a du choix au rayon vin. Je me disais que vu le prix des menus, le restaurant allait se rattraper sur les vins. Pas du tout : on reste dans le raisonnable avec une carte en pleine évolution et quelques belles références.

La première bonne surprise (mais je sais que beaucoup ne partageront pas mon avis), c’est l’absence de Bordeaux (à l’exception faite d’une référence de Pétrus). Le sommelier considère que la cuisine du chef s’adapte mal aux tannins des vins de Bordeaux et il a donc pris le parti de ne pas en proposer (il a toutefois commencé une prospection dans des régions satellites pour trouver des accords qui fonctionneront).

La seconde surprise, c’est du clos Rougeard, mon vin préféré, à la carte et à prix correct ! Le Brézé blanc 2011 me fait de l’oeil et me tente. Le soucis ? J’ai peur de commettre un infanticide. Je demande donc conseil au sommelier. Très honnêtement, il me répond qu’il ne peut pas m’aider car le vin vient juste de rentrer. Un sommelier humble et honnête : j’adore !

Il aurait pu essayer de me sortir un discours tout fait, de me parler de façon générale du vin et du domaine ou de me répondre un commentaire facile du genre « Chez Rougeard, tout est bon ». Mais non il est honnête et droit. Bravo ! Je me rabat donc sur un autre blanc de Loire et puis sur le Clos rouge 2011, un vin que je devine bien plus à boire maintenant.

Au fil du repas, une discussion s’entame avec ce jeune sommelier passionné. On parle domaine, on parle vigneron et on parle cépages. A la fin du repas, son sérieux et sa passion m’ont convaincu. La prochaine fois, je lui ferai confiance et j’opterai pour sa sélection !

Vous l’aurez compris, ce repas fût un grand coup de coeur ! La grande cuisine d’Alexandre Bourdas, le sens de l’accueil de Delphine, la passion du sommelier et la gentillesse du personnel : un cocktail explosif qui ne laisse pas indifférent et qui ne donne l’envie que d’une chose : revenir le plus vite possible !


MENU

Mise en bouche

« Tout repas commence chez moi par le partage du pain, plus précisément la pascade que l’on rompt et tend à chacun. »

Lotte pochée, citron vert, livèche & coriandre, bouillon clair à la noix de coco & huile de combava

La Saint-Jacques snackée, galette de chou, jambon, fromage blanc, émulsion ail/soja/gingembre

La daurade étuvée, crème de pomme de terre, jus de poulet rôti, poutargue & Hollandaise (2010)

Le lieu grillé, risotto au jus de laitue, coques, sansho mariné, citron caviar

Galette de sarrasin, crème de polenta, truffe Melanosporum râpée, Comté

Le café, sucre muscovado, pâte d’amande, caramel, mascarpone au Jerez & sorbet citron

Guimauve croûtée de vanille, sorbet à la mandarine entière, crème et thé Matcha (2015)

Mignardises


LOCALISATION

France – Honfleur


PHOTOS


LIEN

http://saquana-alexandre-bourdas.com/

2 Responses

  1. Lo

    Pour info, la lotte fait déjà partie des classiques de la cuisine d’Alexandre Bourdas depuis quelques années. 😉

    • PassionGastronomie

      En effet, Delphine nous a expliqué que le premier plat était décliné depuis longtemps mais le poisson change régulièrement d’après ce qu’elle expliquait.

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